Conseil national Session d’automne 2023 Dixième séance 21.09.23 – texte provisoire
20.3237 – Réseau de téléphonie mobile. Créer dès à présent les conditions générales propices à un déploiement rapide.
Pasquier-Eichenberger Isabelle (G, GE): Cette motion du groupe libéral-radical a pour objectif de déployer rapidement et à moindre coût la 5G en faisant fi du principe de précaution et de la santé des personnes les plus sensibles. Je rappelle que 5 à 10 pour cent de la population souffre d’électrosensibilité.
Depuis la date du dépôt de cette motion, la situation a passablement changé. J’aimerais attirer votre attention sur quatre points.
Premièrement, les besoins de la population et de l’économie sont d’ores et déjà couverts; nous avons l’un des meilleurs réseaux. Selon le rapport de l’OFEV de mars 2023, le taux de couverture du principal opérateur est de 99 pour cent. 8500 antennes 5G sont déjà opérationnelles – ce n’est donc pas du tout le chaos qui nous a été présenté. La 5G est donc déjà déployée.
Deuxièmement, la recherche a montré que la capacité de transmission ne dépend pas des valeurs limites. En effet, le Conseil fédéral a publié, en avril 2022, un rapport qui indique clairement qu’il n’est pas utile de modifier les valeurs limites pour augmenter les capacités.
Pourtant, et c’est le troisième point, les normes sont déjà aujourd’hui affaiblies. La Confédération a modifié l’ordonnance sur la protection contre le rayonnement non ionisant (ORNI) en janvier 2022 et a introduit une nouvelle méthode de calcul pour les antennes adaptatives, constituant, de fait, un assouplissement. De plus, elle a simplifié la procédure pour les antennes adaptatives, qui ne doivent plus être soumises à l’enquête. Ainsi, elle nie aux riveraines et aux riverains la possibilité de défendre leurs droits.
Pour rappel 3200 procédures d’autorisation de construire étaient suspendues à la fin juin 2022. Cet exercice des droits populaires visiblement contrarie.
Ces deux changements ont heurté les organisations qui se préoccupent de l’impact des rayonnements non ionisants et dénoncent une augmentation massive, aujourd’hui déjà, de l’exposition.
Quatrième point, ce même rapport précise qu’il faudra presque quatre fois moins d’antennes que prévu, ce qui réduit considérablement les coûts à la charge des opérateurs. Dès lors, les buts officiels de cette motion sont déjà atteints.
Par contre, cette motion est inutile et dangereuse. Le lobby des opérateurs est derrière ce texte, lui qui veut continuer d’affaiblir les mesures de protection de la population et de l’environnement. Certes, la version du Conseil des Etats est plus favorable, puisqu’elle assure le maintien des valeurs limites. Mais la récente prise de position de l’Association suisse des télécommunications (ASUT) montre bien ses objectifs. Ses propos y sont très clairs. L’ASUT déplore que les procédures d’autorisation soient freinées et que les citoyennes et citoyens exercent leurs droits démocratiques. L’ASUT considère que l’ordonnance sur la protection contre le rayonnement non ionisant (ORNI) “limite inutilement la capacité des installations de téléphonie mobile ainsi que les possibilités technologiques des nouvelles générations de téléphonie mobile”. Pourtant, je le rappelle, l’ORNI a pour but de protéger la santé de la population et de la nature. L’administration, selon un rapport que nous avons reçu en commission, étudie la possibilité d’adapter une nouvelle fois les recommandations d’adaptation, affaiblissant encore la protection de la population.
Pourtant, les Médecins en faveur de l’environnement nous rappellent que l’exposition au rayonnement de téléphonie mobile n’est pas sans danger pour notre santé et celle de la biodiversité. Ils nous appellent à cesser impérativement d’affaiblir la réglementation préventive. Les effets de la 5G sont encore largement mal connus.
Finalement, notre minorité considère qu’il n’y a pas lieu de privilégier ainsi la téléphonie mobile. La plus grande partie des données sont utilisées pour regarder des films depuis chez soi. Le Parlement a soutenu une extension du service universel pour le haut débit. Dans les logements et les bâtiments, l’utilisation du réseau fixe est préférable. Cette solution doit être privilégiée.
Je vous remercie de suivre cette minorité et d’affirmer ainsi, d’une part, que le principe de précaution doit prévaloir et doit être appliqué de manière stricte et, d’autre part, que la téléphonie mobile est nécessaire, mais qu’une utilisation réfléchie et mesurée est possible, tant du point de vue de la santé publique que de la protection de la planète.

